Flammes - Robbie Arnott



Comment réagiriez-vous si vous découvriez que votre frère s'est mis en tête de construire votre cercueil ? Charlotte McAllister, elle, saute dans le premier bus pour le sud de la Tasmanie et s'enfuit, bientôt suivie par une détective privée engagée par son frère Levi. Fou, le grand frère ? Non, mais très perturbé depuis le décès de leur mère qui, comme ses aïeules avant elle, est réapparue peu après sa crémation pour accomplir une dernière tâche - ou régler un compte. Levi, qui a pris conscience que sa soeur, si elle meurt avant lui, pourrait subir le même sort, a donc décidé qu'elle sera inhumée.

Voilà la trame rocambolesque du premier roman du jeune auteur australien Robbie Arnott (né en 1989). Et il n'a pas choisi la facilité avec des chapitres qui alternent les points de vue entre personnages humains, dieux de la nature, animaux (si, si !). Cela vous effraie ? Il n'y a pas de quoi, je vous assure. La preuve, même moi qui évite plutôt ce genre de récit, j'ai été complètement charmée, envoûtée par la magie - qui a perduré plusieurs jours - de ce roman singulier et enthousiasmant !

Un souvenir tranchant comme un éclat de verre : son père qui rentre à la maison un soir d'été. (...) Leurs regards se croisent, et le sourire reste en place jusqu'à ce qu'il arrive au bout de l'allée, que la journée ait été bonne ou mauvaise, jusqu'à ce que sa main balafrée plonge dans ses bouclettes cuivrées et en fasse un écheveau de nœuds. (...) Rien qu'à y repenser, même des années après, elle sentait jaillir en elle une chaleur qu'elle ne pouvait contrôler ou décrire, car elle savait qu'elle était à l’origine de ce sourire d'été. (p. 157)

Il y a de l'humour, du loufoque, des descriptions de paysages et de phénomènes météorologiques très réussis (je pouvais presque sentir la pluie ou l'odeur des fougères), des sentiments, de l'obsession, on y parle de deuil, de renaissance, et un saupoudrage (même un peu plus) de fantastique.

Cela faisait des semaines qu'elle n'avait pas senti son regard la chercher depuis le fleuve et, bien qu'elle le sût dieu, elle avait craint le pire. La fumée de Notley qui était parvenue jusque dans sa nébuleuse le lui avait confirmé : il était mort. Elle n'aurait jamais confondu cette odeur avec une autre. Lui qui possédait le fleuve périssait à présent par les flammes. Il ne gravirait plus jamais la montagne sombre pour l'admirer, plein d'espoir. Elle n'alimenterait plus jamais son royaume avec ses larmes d'amour désolée. Elle ne le nourrirait plus de sa pluie. Plus jamais, jamais. (p. 241)

Si j'ai trouvé qu'il était parfois difficile de faire le lien entre un personnage et un autre (mais on comprend tout à la fin), chaque chapitre est comme une mini histoire qui s'enchaîne au suivant.

Un très grand merci à la personne qui m'a prêté son exemplaire et donc permis de découvrir ce petit bijou.

Alors, je vous ai tenté ? Dites-moi tout !

(éd. Actes Sud, Flames traduit par Laure Manceau, 256 pp., 2019)

Commentaires

Kathel a dit…
Oui, oui, tout à fait tentée ! Même les différents narrateurs ne m'effraient pas !
niki a dit…
sujet intéressant - je suppose qu'il faut le lire pour y découvrir le loufoque - dès qu'il y a des flammes, je renâcle un peu
lewerentz a dit…
Kathel: je suis ravie ! 🙂

Niki: ne t'inquiète pas, rien de dramatique avec les flammes 😉

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