Froid comme l'enfer - Lilja Sigurdardóttir

source: site éditeur

Aurora, enquêtrice spécialisée dans les fraudes fiscales et le blanchiment d'argent, se rend en Islande à la demande de sa mère pour retrouver sa sœur ainée Ísafold qui n'a plus donné signe de vie depuis deux semaines. Ce n'est pas la première fois qu'elle se rend dans le pays de son enfance pour y retrouver sa sœur battue par son petit ami Björn. Mais les témoignages et renseignements qu'elle recueille lui font comprendre que la situation est sérieuse - et Ísafold reste introuvable.

L'œil droit d'Ísafold est comme enfoncé dans une boursouflure rouge vif. Assise à la table de la cuisine chez son voisin du dessous, elle semble avoir passé un long moment ici, à en juger par l'amoncellement de mouchoirs humides de larmes devant elle.
Le voisin en question est un type étrange. La peau d'une extrême pâleur, et complètement chauve, il a l'air singulièrement inexpressif. Il tremble de nervosité. Trop préoccupée par son propre chagrin, Ísafold
 ne remarque pas que l'homme n'attend qu'une chose : qu'elle et ses problèmes partent loin de chez lui.
Sur la joue gauche d'
Ísafold, une ecchymose vient d'apparaître. Bleu sombre au milieu et cerclée de violet, elle fait penser à une nappe de pétrole. 
Celles sur son bras, elles, sont noires et tellement gonflées que la peau semble sur le point de se fendre, comme si, sous la surface, un magma de sang s'apprêtait à jaillir en une puissante explosion.
- Tu dois avoir une fracture, dis-je [Aurora].
Elle secoue la tête. Me rétorque qu'elle n'a pas besoin d'aller aux urgences. Elle veut juste dormir en paix. Je propose de lui réserver une chambre d'hôtel pour libérer son voisin, et elle acquiesce.
Sur le chemin, je m'arrête au foyer pour les femmes victimes de violences, dans l'espoir qu'elle écoute leurs préconisations.
Ísafold est trop faible pour protester, mais elle se défend avec vigueur contre les évidences que lui assène la conseillère. Elle prétend que c'est de sa faute. Qu'elle a provoqué Björn. Qu'elle est elle-même responsable de son œil au beurre noir et des ecchymoses sur sa peau. (p. 101)

Ce roman est étiqueté "policier & thriller" par ma bibliothèque et se trouve en principe aussi au rayon dédié dans les librairies. Je parlerais plutôt d'un roman noir. Certes, il y a une enquête mais l'auteur en fait le prétexte pour décortiquer la société actuelle faite de violences domestiques, d'immigration et d'intégration, de fraudes fiscales, de névrose, de déni, mais aussi d'amour (familial ou entre deux personnes).

J'ai aimé les personnages - assez "étranges" et pas forcément sympathiques, y.c. Aurora -, l'ambiance et le ton du texte. Amateur d'enquêtes qui mêlent folklore et traditions, passer votre chemin; on a affaire ici à un roman très sombre, voire glauque. Froid comme l'enfer, nul ne peut le dire, mais qui fait froid dans le dos, ça oui, assurément.
J'ai également apprécié aussi les histoires qui gravitent autour de l'intrigue principale, principalement celle d'Olga, une vieille dame qui héberge illégalement un réfugié syrien dont la demande d'asile a été rejetée.

Lilja Sigurdardottir (née en 1972) vit entre Ecosse et Islande. Sa trilogie
Reykjavik noir l'a fait connaître. 

(éd. Métailié, Helköld sól (2019) traduit de l'islandais par Jean-Christophe Salaün, 287 pp., 2022)

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