Dernier cri avec post-scriptum - Jacques A. Bertrand




Je suis à plusieurs reprises
fallen in love à la façon dont on se laisse aller. Voire comme on se jette du haut d'une falaise. A seize ans. A douze déjà. A trois, si j'en crois ma mémoire qui est presque aussi vieille que moi. Dieu, dans sa grande commisération, nous garde de réaliser nos rêves. Et parfois, pour nous punir sans doute, c'est du moins ce que pensait Oscar Wilde, nous permet de les accomplir.
J'étais très jeune, ce qui n'est pas davantage une excuse, comme on tend à le croire aujourd'hui, que la vieillesse.
(extrait de Bémol, p. 17)

Un drôle de titre pour un recueil de chroniques, de miscellanées, qui oscillent continuellement entre sérieux, humour, ironie et malice, parfois nostalgie, sur l'homme et notre époque. Des sujets aussi variés que la mode, la bise, l'humilité ou encore la Toscane.

Les quelques extraits reproduits ici vous donneront une bien meilleure idée de ce recueil que je ne pourrais vous le présenter. C'est difficile d'en parler; le mieux est de se lancer et le lire.

Un grand merci à la personne qui me l'a offert et m'a ainsi fait découvrir un auteur que je ne connaissais pas du tout mais relirai avec plaisir.

Jacques A. Bertrand (né en 1946) a étudié le journalisme et s'y est consacré avant de publier ses premiers livres dont plusieurs ont été récompensés de prix (dont le prix de Flore).

Toscane
Sophie s'étonne de trouver chez moi du Campari.
J'explique.
J'avais beaucoup aimé "La pluie d'été" de Marguerite
[Duras].
Dans la bibliothèque d'un ami, je tombai sur "Les petits chevaux de Tarquinia". Le titre me fit espérer quelque chevauchée littéraire à la Duras.
Il s'agit d'un récit de vacances bavardes en Toscane. Toutes les deux ou trois pages, tout en discutant, les personnages boivent du Campari.
Le livre ne m'a que modérément intéressé.
Je me suis mis au Campari.

Tempus
J'étais déjà sujet à l'angoisse du Temps. D'abord infiniment trop lent, il se mit à passer trop vite.
Le Temps. J'ai bien sûr le plus grand respect pour la Science. On risquerait aujourd'hui d'être condamné au bûcher en la critiquant, comme, en d'autres temps, on pouvait l'être pour la défendre. Mais je ne peux m'empêcher d'en vouloir à tous ces gens - probablement animés des meilleures intentions - de s'être évertués à mesurer le temps.
Qu'est-ce que le temps, me demanderez-vous, non sans ironie, vous qui êtes familier de son calcul atomique qui règle la marche des satellites, des télescopes géants et des stations spatiales ? Ne le prenez pas mal : ce temps est un faux temps. Un temps de machines. Le temps n'est pas mathématique. Le temps est psychologique. Les mêmes heures durent des années aussi bien que des secondes.
Le temps est une horloge intérieure qui, déjà, contrariait celui de la clepsydre à eau, qui n'appartient qu'à vous. (extrait, p. 19)

(éd. Mialet Barrault, octobre 2021, 123 pp.)

Commentaires

Lorouge a dit…
Voilà une lecture qui ne m'aurait pas attiré au premier abord mais les extraits que tu donnes sont plutôt convaincants !!
lewerentz a dit…
L'Or: pour être honnête, c'est un livre que je n'aurais jamais acheté si on ne me l'avait pas offert. Mais franchement, c'est bien.

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