Accabadora - Michela Murgia
source: site éditeur |
Maria Listru, six ans et cadette d'une famille de quatre filles dont la mère est veuve, est adoptée par Tzia Bonaria Urrai, l'héritière d'une riche famille dont le fiancé a disparu lors de la première guerre mondiale. Anna, la mère biologique, n'a jamais fait mystère que Maria est plus une charge et une "erreur" qu'autre chose; elle est donc contente d'avoir une bouche en moins à nourrir. Alors que Tzia, qui n'a jamais eu d'autre amant ni d'enfant, est heureuse de s'occuper d'elle. Et Maria, encore jeune, quitte sans regret sa famille. Si les premiers jours, Maria et Tzia se cherchent, une relation sereine et de confiance s'établit rapidement et, entre les cours à l'école, Maria aide Tzia qui travaille comme couturière.
Un soir, pourtant, environ deux ans plus tard, un homme vient, dans la nuit, chercher Tzia qui le suit, enveloppée dans un grand châle noir. Si la fillette se pose des questions, elle oublie l'événement. Jusqu'à ce que, alors adolescente, Nicola, le frère aîné de son ami Andría, décède. Depuis plusieurs mois, à la suite d'un accident, il avait été amputé d'une jambe et ne trouvait plus aucun goût à la vie, sachant qu'il ne pourrait jamais reprendre le domaine viticole familial et qu'une femme ne voudrait, selon lui, jamais l'épouser - ou par pure pitié. Mais ce qui perturbe Maria, c'est qu'Andría lui affirme avoir vu Tzia tuer son frère, au cœur de la nuit, avec un coussin. Tzia qui, à nouveau, était enveloppée dans son grand châle noir et avait passé pas mal de temps auparavant avec Nicola. Maria est déstabilisée; est-ce vrai ? Quel secret cache sa chère Tzia ?
Un très beau roman emprunt des us et coutumes d'un petit village sarde, de l'adoption, les liens filiaux qui ne sont pas forcément des liens biologiques, la mort et... l'accabadora - désolée, je ne peux pas en dire plus sous peine d'en dire trop.
paysage de Sardaigne / source : emagazine.meridiana.it |
Une belle découverte, d'une auteur, d'une écriture simple mais poétique et délicate. Vivement recommandé !
Prix Campiello 2010
Bien qu'elle fût plongée dans le rite collectif du deuil, Bonaria Urrai remarqua le départ précipité et donc inconvenant de Maria, dont elle ne devina le motif qu'à moitié. Mais elle ne pouvait se permettre le luxe d'obéir à son instinct en un jour pareil : Nicola Bastíu méritait son respect jusque dans la terre où on le déposerait. C'était, pour elle, la seule occasion d'honorer les promesses secrètes qu'elle lui avait faites, et elle savait que Maria serait à la maison à son retour. Voilà ce que pensait la couturière de Soreni, assise à coté de Gianina et Salvatore Bastíu, qui l'avaient toujours considérée comme un membre de la famille, tandis qu'elle s'unissait au Requiescat comme si elle avait affaire à un mort comme les autres. (p. 120)
source: vivimilano.corriere.it |
Michela Murgia (née en 1972 à Cabras, Sardaigne) est romancière et femme politique (candidate à la présidence de la Sardaigne en 2014). Un autre de ses romans, Leçons pour un jeune fauve, vient de paraître en français. Elle a également publié un guide de la Sardaigne et une critique satirique de la vie d'employés dans un centre de télémarketing.
(éd. du Seuil, Points, traduit de l'italien par Nathalie Bauer, 182 pp., 2011)
Commentaires
beaucoup aimé et surtout lu sur place en Sardaigne!