La vérité et autres mensonges - Sascha Arango

Henry éclata de rire. Il était convaincu depuis toujours que la compassion ne fait que ralentir le processus de guérison. Une petite blague remet plus vite sur pied un malade qu'un suppositoire de pitié. (p. 197)

Louée soit cette clé ! Henry avait remercié plus d'une fois la main bienveillante du hasard, qui intervient sans se préoccuper de qui vous êtes, pour effectuer des corrections minimes suffisant à transformer une situation d'échec en distribution des prix. Lui qui, d'habitude, pensait à tout, ne s'était pas attendu à ce qu'un détail aussi infime qu'une clé de voiture prenne une telle importance. (...) Pour les délinquants de toute espèce, y compris évidemment les arnaqueurs à l’assurance, cela signifie tout simplement que dans la fabrication des légendes il n'y a pas de détail secondaire, tous les détails sont d'égale importance. (p. 318)

Voici deux extraits qui, à mon avis, donnent le ton de ce roman qui n'est ni un policier, ni un thriller, mais l'histoire d'Henry, un minable qui s'est construit une vie de rêve fondée sur le mensonge. Oh, rien de bien méchant : il est un écrivain à succès - enfin, c'est son épouse Martha qui écrit ses romans car il en serait bien incapable. Mais la gloire ne l'intéressant pas le moins du monde, elle lui laisse volontiers le premier rôle. Pourtant, tout est sur le point de s'écrouler à la suite d'un malheureux accident : voulant tuer sa maîtresse, il pousse sa voiture en bas d'une falaise - sauf que, c'est son épouse qui se trouve dans la voiture. Comment va-t-il continuer la supercherie ? Il si la police découvrait la vérité ?

L'intrigue est très bien menée, sans être pleine de rebondissements à la chaîne qui, à force de se succéder, deviennent bien peu plausibles et fatigants - chacun ses goûts, moi, ce n'est pas trop ma tasse de thé.

Le personnage d'Henry est riche en complexités; prêt à tout mais capable de vrais sentiments envers Martha, son meilleur ami (un poissonnier d'origine serbe) ou Claus (son éditeur).

L'atmosphère est feutrée - j'ai beaucoup aimé. Il y a aussi beaucoup d'humour ou du moins d'ironie.

Mon seul regret concerne les décors que j'ai trouvé insuffisamment décrits. Pendant longtemps, je me suis demandée où se passe l'intrigue - ce n'est d'ailleurs jamais explicitement dit mais on finit par déduire que c'est quelque part sur la côte nord, au bord de la mer.

J'aime beaucoup l'Allemagne et j'étais ravie de lire un auteur allemand. Mais pourquoi tous ces noms à consonance anglophone ? Vraiment, j'ai regretté que ce ne soit pas plus ancré dans l'Allemagne d'aujourd'hui. Mais ceci est bien peu de chose en comparaison du plaisir que j'ai eu à lire ce très bon roman.

source: welt.de
Sascha Arango (né en 1959) écrit pour le théâtre, la radio, la télévision et le cinéma. Il a obtenu plusieurs prix.

Lu pour le jury du Prix des lectrices de Elle 2016.

(éd. Albin Michel, traduit par Dominique Autrand, 332 pp.)

Commentaires

cathulu a dit…
Le 3ème billet-plus que positif- en peu de temps sur un même roman, c'est un signe :)
Anonyme a dit…
Je le vois partout en ce moment ce roman, il a l'air sympathique et ferait un bon divertissement.
keisha a dit…
J'ai lu aussi un billet fort positif, je n'avais pas remarqué ce roman (j'ignorais que l'auteur était allemand)

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