Jirô Taniguchi, l'homme qui dessine
Entretiens avec Benoît Peeters.
(éd.
Casterman, 2012)
extrait de "Quartier lointain" - source image : Paperblog.fr |
Si
vous aimez les mangas de Taniguchi, ce très beau livre est pour vous, car il
est absolument passionnant !
Il se compose de six entretiens avec
l’écrivain Benoît Peeters (Corinne Quentin jouant les traductrices entre les
deux) qui abordent différents aspects de la carrière de Taniguchi : sa
formation, son établissement en tant que mangaka, son parcours d’auteur et
dessinateur, les liens et différences entre manga et bande dessinée européenne
(+ quelques incursions vers les comics américains et les romans graphiques),
son style, et, pour conclure, son regard sur le monde.
J’ai
lu plusieurs manga de Taniguchi (Quartier lointain, Le journal
de mon père, L’orme du Caucase, Le gourmet solitaire, Un
ciel radieux, Un zoo en hiver), presque toujours dans sa veine
intimiste. Un seul (Le sauveteur) était plus dur, plus sombre, et
montrait un autre aspect de l’œuvre de Taniguchi qui, je m’en suis rendue
compte au fil de ma lecture, est extrêmement variée. En réalité, seule la
seconde partie de sa production a été traduite. Car au début de sa carrière de
mangaka, il a dessiné pour des revues érotiques, puis a collaboré avec
(principalement) deux scénaristes et produit des mangas assez durs, dans des univers
plus inhabituels de ceux auxquels on l’associe (la boxe, la pègre, etc.).
On
apprend les influences de Taniguchi : d’abord les mangakas chez qui il
était assistant, le cinéma, la bande dessinée européenne (notamment Moebius et
François Schuiten), la façon dont il travaille (avec parfois des questions
très concrètes comme son horaire), le travail qu’il confie à ses assistants,
les voyages de repérages qu’il effectue, sa collaboration avec le scénariste
(lorsqu’il y a en a un) et l’éditeur qui est beaucoup plus impliqué au Japon
que dans la BD européenne, la façon dont il procède (esquisses, story-board,
cadrages, encrage, etc.). Il y a également tout une partie sur la
traduction : le japonais se lisant de droite à gauche et de haut en bas,
la traduction nécessite un grand travail d’adaptation, le placement des bulles
de textes peut varier, etc. Taniguchi participe a tout cela, donne son avis,
etc.
J’ai
particulièrement aimé le dernier chapitre dans lequel des thèmes plus
personnels sont abordés (son rapport à la politique, ses voyages, son rapport
avec les animaux, les enfants, etc.).
J’ai
apprécié que la forme de l’interview soit conservée, car, du coup, le livre est
très accessible et les analyses exprimées avec des mots de tous les jours. Les
questions sont pertinentes et les réponses fines, souvent émouvantes. Le tout
est largement illustré d’extraits de son œuvre (en français comme en japonais,
de dessins inédits et de photos personnelles).
Bref,
c’est absolument passionnant !
Mon
manga préféré est Le journal de mon père. Enfin, pour l’instant, car
j’ai bien l’intention d’en lire d’autres : Le sommet des dieux et Au
temps du Botchan, notamment, me tentent bien. Et vous ?
source image : site Culturmag.de |
Jirô Taniguchi est né en 1947 à Tottori et a débuté comme assistant mangaka au début des années 70. Son oeuvre a été publiée dans de nombreux pays (souvent avec plus de succès qu'au Japon !) et a reçu de nombreux prix.
Benoît Peeters est né à Paris en 1956. Ecrivain et essayiste, il a consacré plusieurs ouvrages à la BD (notamment à Hergé) et a aussi collaboré à des albums de F. Schuiten ou F. Boilet en tant que scénariste.
Corinne Quentin est responsable du bureau des copyrights français à Tokyo. Elle a notamment traduit plusieurs mangas de Taniguchi.
Commentaires
Maggie: jamais lu Taniguchi ? C'est d'une grande sensibilité. Bonne lecture (quand tu auras le temps ;-)