L'amour au cinéma - Eveline Mailhot



Une belle découverte ! 

C’est un peu au hasard que j’ai emprunté ce livre à ma bibliothèque. La couverture et le graphisme me plaisaient bien, il s’agit de nouvelles et le commentaire était tentant. En plus, il s’agit d’une auteur québécoise et, je l’avoue bien honteusement, je ne sais rien (ou presque) de la littérature canadienne. 

Je n’ai pas regretté ce choix, car j’ai beaucoup aimé ces nouvelles qui ont toute l’amour pour thème, et des sujets qui en découlent : plaisir, absence, solitude, etc. Pourtant, je suis un peu empruntée pour vous exprimer mon plaisir et vous inciter à le lire. Peut-être que j’aurais dû attendre un peu avant d’écrire ce billet, que les choses sont encore trop fraîches. En tout cas, j’ai beaucoup aimé l’écriture, le style très coulant et simple, le choix du vocabulaire et la construction. Dans plusieurs textes, celle-ci n’est pas linéaire mais s’enroule sur elle-même ou mélange les séquences qui portent toutes un titre, ce qui permet de comprendre leur chronologie. Un peu comme au cinéma, en fait. Les textes sont très évocateur ; je n’avais aucun mal à imaginer les scènes.Un extrait sera plus parlant que toutes mes possibles explications :  

« Félix face à la mer 

En regardant la mer, Félix repensait aux romans d’Hemingway qu’il avait lus plus jeune pendant ses voyages en Europe. Il se souvenait de la satisfaction éprouvée quand il reconnaissait dans ses rencontres des traits que l’auteur se plaisait à attribuer au « tempérament latin ». Aujourd’hui, les observations romantiques des autres n’avaient plus le même effet sur lui. Il aurait pu se faire croire qu’il avait développé un regard plus indépendant sur les choses. Il savait que ce n’était pas vraiment le cas. Il détestait vieillir. A trente-huit ans, il n’avait pas plus d’idées qu’à dix-neuf ans. Il était simplement devenu plus méfiant. » (extrait de « Face à la mer », p. 53) 

Le recueil comprend huit courtes nouvelles (une vingtaine de pages chacune). Mes deux préférées : « Face à la mer » et « L’échec du nymphomane » dont voici un extrait : 

« Toute la journée se déroula ainsi, dans des conversations à demi-mots et des évitements à peine subtils. Et le reste de la semaine aussi. Steve K. dormait mal et devenait impatient à la maison. Sa conjointe Vivianne lui posait les questions qu’il faut dans ces cas-là. Elle s’informait de son moral et Steve K. s’obligeait à lui donner des réponses très sensées. Il lui parlait de sommeil troublé et de recherches frustrantes, mais il continuait tout de même à laisser échapper des verres, à s’irriter d’objets égarés et à partir le matin sans avoir lu le journal. L’atmosphère du laboratoire devenait de plus en plus dense et les autres chercheurs le sentaient, mais, comme il ne leur serait jamais venu à l’esprit que le très égal Steve K. pouvait être la cause du malaise, ils se disaient qu’ils avaient dû se lever du mauvais pied. Camélia, elle, ne comprenait pas le changement qui s’était opéré chez celui qui l’avait accueillie si chaleureusement. Elle avait toujours l’impression d’être de trop quand elle se trouvait dans la même pièce que lui et ce sentiment, joint à l’incontournable présence des rats, suscitait en elle une agressivité qu’elle parvenait à contenir, mais qui minait son  moral et la portait à regarder des séries télé qu’elle n’aurait jamais pu supporter en temps normal. » (pp. 30-31) 



Eveline Mailhot est née en 1979 à Montréal où elle a grandit. Elle a étudié la philosophie, au Canada puis en Belgique et en France. Ce recueil est sa première publication. 

(éd. Les Allusifs, 2011)
(image couverture : site éditeur)
(photo auteur : site La recrue du mois) 

Commentaires

Anonyme a dit…
Dommage qu'on ne puisse plus compter sur "Les Allusifs" pour nous faire découvrir la littérature canadienne...
lewerentz a dit…
Ys: pourquoi ? les éditions n'existent plus ?

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